FIN DE L’AVENTURE


12 Mars - 30 Mars

Alors que les informations sur le Coronavius deviennent incontournables et que la situation ne cesse d’empirer en Italie, nous prenons la route pour l’aéroport dans l’idée de rejoindre notre ultime étape : le Guatemala. Les rumeurs d’un confinement prochain en France s’avèrent réelles et nous commençons à nous poser des questions sur notre arrivée au Guatemala. Ce que nous redoutions arrive et le président Guatémaltèque annonce la fermeture des frontières à tout ressortissant européen le jour même de notre arrivée présumée. Nous arrivons à l’aéroport de Mexico et commençons à envisager un plan B si nous ne parvenons pas à monter dans l’avion. Un employé aéroportuaire semble confiant et nous conseille de tenter le tout pour le tout. Nous l’écoutons. Alors que nous ne sommes plus qu’à une heure de l’embarquement et qu’un amas de personnes inquiètes se forme devant les portiques, nous entendons nos noms appelés au micro. C’est à nous de jouer, et nous avons mis les forces de notre côté en préparant notre plaidoyer. Nous leur montrons nos passeports, Xa renchéri en sortant la liste des dates et pays traversés depuis 16 mois prouvant que nous ne sommes pas retournés en Europe depuis. C’est bon, c’est gagné pour nous. Le guatemlateque à côté duquel je m’assois ne semble pas rassuré de notre présence dans l’avion et est à l’affut du moindre reniflement ou toux de ma part.



Nous arrivons à Ciudad de Guatemala vers minuit, et patientons sagement que chaque arrivant passe le test de température et réponde aux questions des agents en poste. Là encore il nous faut sortir notre plus bel argumentaire pour passer le barrage. Mais nous y parvenons et bientôt nous sommes dans le taxi qui nous mène jusqu’à Antigua.
Nous logeons chez Claudia et sa fille Camilla. Remis de nos émotions, le lendemain, nous retrouvons nos petites habitudes et commençons par un petit déjeuner à Fernando Café. Sur la route du retour nous passons voir Sara et Anna, les personnes chez qui nous logions il y a un an de ça. La ville est prête pour l’évènement le plus important de l’année : la semana santa. C’est également l’une des raisons (parmi tant d’autres) de notre retour ici.



Durant cette semaine ce sont de nombreuses processions religieuses qui traversent la ville célébrant la mort puis la résurrection de Jésus. Du plus jeune au plus vieux, toute la ville est mobilisée. Des kilomètres de tapis fait de sciure de bois coloré, de fleurs et d’épines de pin sont disposés dans les rues. Les hommes vêtus du fameux « Cucurucho » violet chargent sur leurs épaules les saints qu’ils font alors défilés dans les rues d’antigua. Il faut dire que les habitants se donnent du mal, ils travaillent toute l’année et le jour venu défilent plus de 8 heures durant.

Ce jour là était justement une procession faite par des enfants en attendant la réelle semana santa

En attendant nous retournons à notre marché favoris et faisons le plein de fruits et légumes. C’est le soir que notre petit monde s’écroule. Bien loin de la menace virale et peu conscients de l’ampleur de cette dernière nous continuions à faire nos plans pour le mois qui nous restait ici. Mais les autorités guatémaltèques, elles, ont bien saisi l’enjeu de cette crise sanitaire et ont pris les mesures à temps. Nous apprenons tout d’abord que la Semana Santa est annulée. Puis nous comprenons bien vite que les écoles aussi vont être fermées. Notre volontariat tombe donc à l’eau et nous ne reverrons ni l’équipe pédagogique, ni les enfants que nous avions accompagné 1 an plus tôt. L’ambassade Française, quant à elle nous demande de rejoindre le pays au plus vite.

Un choix cornélien se présente à nous. L’idée de rentrer alors que nous avions tant de choses à faire et tant de personnes à revoir ici nous questionne. Et rentrer pourquoi ? Se jeter dans la gueule du loup, alors qu’ici seul 1 cas a été répertorié et que la situation est sous contrôle ?
D’un autre côté, si nous ne rentrons pas maintenant aurons nous une option plus tard ou serons-nous bloqués au Guatemala ?

Nous décidons de prendre notre temps dans cette période de précipitation. Nous commençons par revoir les enfants que nous parrainons après avoir passé les tests de santé nécessaires, puis nous prenons en compte toutes les options que nous avons. Nous décidons finalement de rester et de voir comment les choses évoluent.



Nous revoyons également notre amie Sindy, l’occasion de sortir boire un verre une toute dernière fois. En effet, car le lendemain l’annonce tombe, nous sommes soumis à un couvre feu à 16 heures. Les commerces ferment et l’activité touristique est gelée. Enfin, les frontières ferment complètement et l’aéroport scelle ses portes. Nous ne nous laissons pas gagner par l’angoisse ambiante et laissons les Français se ruer sur les « dernières options de sorties » qui se traduisent par : un passage de frontière à risque, rejoindre le Mexique où les gens s'agglutinent et multiplient les chances de se transmettre le virus, ou encore prendre un vol à plus de 1000 euros le billet.



Nous passons notre semi-confinement avec Claudia et sa fille, ainsi que Rachel la mi costa ricaine, mi gringa aussi hébergée ici. J’allais presque oublier Sombra le chien-loup et les deux chats de Camilla. Nos journées sont rythmées par des jeux de société, de la lecture, des parties de poker (pour Xa) et de bon petits repas.

Les jours défilent jusqu’au 27 Mars où l’ambassade de France nous fait signe pour nous proposer un vol de rapatriement le dimanche 29 Mars. Nous ne jouons pas plus avec le feu et nous manifestons pour faire partis de ce vol. Le lendemain nous apprenons qu’il est reporté d’un jour. Nous prenons nos dispositions et passons une dernière soirée avec cette charmante petite famille. Je ne m’attarderais pas sur les conditions du retour, qui clairement ont été un désastre. Et je ne dis pas ça pour l’organisation de l’ambassade qui a fait un travail de dingue, mais pour la mentalité de ces français avec qui nous sommes rentrés. Une honte affligeante nous a gagné de la file d’attente jusqu’à l’atterrissage en voyant les comportements de certains de nos compatriotes. Nous garderons à l’esprit les au revoir à la famille de Kleymer et Emelyne le matin même pour ponctuer la fin de ce voyage. 



C’est une longue et enrichissante expérience qui se termine dans des circonstances singulières. Mais encore déconnectés de la réalité cela ne nous a pas plus affectés. Encore maintenant après 3 semaines de confinement passées en France nous ne réalisons pas que nous sommes rentrés. Je ne crois pas me tromper en disant que nous conseillerons à quiconque hésite à voyager de cette manière, de se lancer et d’arrêter de se poser trop de questions. Ces un an et demi sont passés à une vitesse folle, nous avons vécus milles et une choses extraordinaires que nous n’aurons peut être plus jamais l’occasion de vivre. Nous avons fait des rencontres de tout type, nous avons appris à nous adapter, à vivre dans les conditions les plus modestes, à goûter à tout. Nous avons vu un volcan en éruption à plus de 3000 mètres d’altitude, nous avons fait du rafting entourés des plus beaux paysages montagneux, nous avons dormis sur une île déserte régie par la loi d’une société matrilinéaire, nous avons passé un mois à dormir dans le désert, dans un hamac à deux pour partager le mode de vie des Wayuu, nous avons nourri un lion, des serpents, des pumas... Et j’en passe.



Plus qu’une ouverture sur le monde, le voyage est à la fois un apprentissage, une introspection et une invitation à la réflexion. 

FIN DEL VIAJE 

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